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jeudi 13 novembre 2014

Séance 3 : Corpus de textes réalistes :

Séance 3 : Corpus de textes réalistes :

Objectifs : Étudier le réalisme dans une nouvelle. Savoir étudier et comparer les textes d'un corpus de textes. En retirer des conclusions.

Prosper Mérimée, Mateo Falcone (1829)

Mateo Falcone est l’une des nouvelles les plus célèbres de Mérimée. Elle décrit les mœurs corses, que Mérimée avait étudiées. L’action se situe sous l’Empire, pendant les guerres napoléoniennes. Voici l’incipit de cette nouvelle.


En sortant de Porto-Vecchio et se dirigeant au nord-ouest, vers l’intérieur de l’île, on voit le terrain s’élever assez rapidement, et après trois heures de marche par des sentiers tortueux, obstrués par de gros quartiers de rocs, et quelquefois coupés par des ravins, on se trouve sur le bord d’un maquis très étendu. Le maquis est la patrie des bergers corses et de quiconque s’est brouillé avec la justice. Il faut savoir que le laboureur corse, pour s’épargner la peine de fumer son champ, met le feu à une certaine étendue de bois : tant pis si la flamme se répand plus loin que besoin n’est ; arrive que pourra ; on est sûr d’avoir une bonne récolte en semant sur cette terre fertilisée par les cendres des arbres qu’elle portait.
Les épis enlevés, car on laisse la paille, qui donnerait de la peine à recueillir les racines qui sont restées en terre sans se consumer, poussent au printemps suivant, des cépées très épaisses qui, en peu d’années, parviennent à une hauteur de sept ou huit pieds. C’est cette manière de taillis fourré que l’on nomme maquis. Différentes espèces d’arbres et d’arbrisseaux le composent, mêlés et confondus comme il plaît à Dieu. Ce n’est que la hache à la main que l’homme s’y ouvrirait un passage, et l’on voit des maquis si épais et si touffus, que les mouflons eux-mêmes ne peuvent y pénétrer. Si vous avez tué un homme, allez dans le maquis de Porto-Vecchio, et vous y vivrez en sûreté, avec un bon fusil, de la poudre et des balles, n’oubliez pas un manteau bien garni d’un capuchon, qui sert de couverture et de matelas. Les bergers vous donnent du lait, du fromage et des châtaignes, et vous n’aurez rien à craindre de la justice ou des parents du mort, si ce n’est quand il vous faudra descendre à la ville pour y renouveler vos munitions.

Mateo Falcone, quand j’étais en Corse en 18…, avait sa maison à une demi-lieue de ce maquis. C’était un homme assez riche pour le pays; vivant noblement, c’est-à-dire sans rien faire, du produit de ses troupeaux, que des bergers, espèces de nomades, menaient paître ça et là sur les montagnes. Lorsque je le vis, deux années après l’événement que je vais raconter, il me parut âgé de cinquante ans tout au plus. Figurez-vous un homme petit, mais robuste, avec des cheveux crépus, noirs comme le jais, un nez aquilin, les lèvres minces, les yeux grands et vifs, et un teint couleur de revers de botte. Son habileté au tir du fusil passait pour extraordinaire, même dans son pays, où il y a tant de bons tireurs. Par exemple, Mateo n’aurait jamais tiré sur un mouflon avec des chevrotines ; mais, à cent vingt pas, il l’abattait d’une balle dans la tête ou dans l’épaule, à son choix. La nuit, il se servait de ses armes aussi facilement que le jour, et l’on m’a cité de lui ce trait d’adresse qui paraîtra peut-être incroyable à qui n’a pas voyagé en Corse : À quatre-vingts pas, on plaçait une chandelle allumée derrière un transparent de papier, large comme une assiette. Il mettait en joue, puis on éteignait la chandelle, et, au bout d’une minute dans l’obscurité la plus complète, il tirait et perçait le transparent trois fois sur quatre.



Répondez aux questions suivantes sur une feuille de classeur après y avoir spécifié le titre, l'auteur et la date :

1 Quels détails du décor participent, selon vous, du réalisme ?
2 Comment la nature vous apparaît-elle dans ce passage ?
3 Quel caractère de Mateo Falcone se dessine dans cet extrait ?
4 Selon vous, la narration à la première personne augmente-t-elle ou diminue-t-elle le réalisme de la situation ?

Auto-évaluation après correction : J'ai réussi à répondre à toutes les questions OUI / NON
J'ai fait des phrases correctes OUI / NON
Il ne me manquait aucune information OUI / NON

Honoré de Balzac, Le Cousin Pons (1847)

Sylvain Pons est un compositeur de musique dont la gloire s’est éteinte. Mais il a gardé de son prestige passé le goût des belles choses, et surtout il est resté d’une extrême gourmandise. Ayant de petits revenus, il cherche ainsi toutes les possibilités pour manger de bonnes choses à peu de frais… Mais la société bourgeoise apprécie de moins en moins les
artistes et quand Pons est invité en société, on se moque bien souvent de lui et il subit les pires humiliations. C’est ce qui lui arrive quand il endure le mépris de parents fortunés. Dans l’extrait qui suit, il est reçu par ses cousins parvenus, les Camusot de Marville.

« Madame, voilà votre monsieur Pons, et en spencer encore ! vint dire Madeleine à la présidente, il devrait bien me dire par quel procédé il le conserve depuis vingt-cinq ans ! »
En entendant un pas d’homme dans le petit salon, qui se trouvait entre son grand salon et sa chambre à coucher, madame Camusot regarda sa fille et haussa les épaules.
« Vous me prévenez toujours avec tant d’intelligence, Madeleine, que je n’ai plus le temps de prendre un parti, dit la présidente.
Madame, Jean est sorti, j’étais seule, monsieur Pons a sonné, je lui ai ouvert la porte, et, comme il est presque de la maison, je ne pouvais pas l’empêcher de me suivre ; il est là qui se débarrasse de son spencer.
Ma pauvre Minette, dit la présidente à sa fille, nous sommes prises, nous devons maintenant dîner ici.
Voyons, reprit-elle, en voyant à sa chère Minette une figure piteuse, faut-il nous débarrasser de lui pour toujours ?
Oh ! pauvre homme ! répondit mademoiselle Camusot, le priver d’un de ses dîners ! »
Le petit salon retentit de la fausse tousserie d’un homme qui voulait dire ainsi : Je vous entends.
« Eh bien ! qu’il entre ! dit madame Camusot à Madeleine en faisant un geste d’épaules.
Vous êtes venu de si bonne heure, mon cousin, dit Cécile Camusot en prenant un petit air câlin, que vous nous avez surprises au moment où ma mère allait s’habiller. »
Le cousin Pons, à qui le mouvement d’épaules de la présidente n’avait pas échappé, fut si cruellement atteint, qu’il ne trouva pas un compliment à dire, et il se contenta de ce mot profond :
« Vous êtes toujours charmante, ma petite cousine ! »
Puis, se tournant vers la mère et la saluant :
« Chère cousine, reprit-il, vous ne sauriez m’en vouloir de venir un peu plus tôt que de coutume, je vous apporte ce que vous m’avez fait le plaisir de me demander… »
Et le pauvre Pons, qui sciait en deux le président, la présidente et Cécile chaque fois qu’il les appelait cousin ou cousine, tira de la poche de côté de son habit une ravissante petite boîte oblongue en bois de Sainte-Lucie, divinement sculptée.
« Ah ! je l’avais oublié ! » dit sèchement la présidente.
Cette exclamation n’était-elle pas atroce ? N’ôtait-elle pas tout mérite au soin du parent, dont le seul tort était d’être un parent pauvre ?
« Mais, reprit-elle, vous êtes bien bon, mon cousin. Vous dois-je beaucoup d’argent pour cette petite bêtise ? »
Cette demande causa comme un tressaillement intérieur au cousin, il avait la prétention de solder tous ses dîners par l’offrande de ce bijou.
« J’ai cru que vous me permettiez de vous l’offrir, dit-il d’une voix émue.
Comment ! Comment ! reprit la présidente ; mais, entre nous, pas de cérémonies, nous nous connaissons assez pour laver notre linge ensemble. Je sais que vous n’êtes pas assez riche pour faire la guerre à vos dépens. N’est-ce pas déjà beaucoup que vous ayez pris la peine de perdre votre temps à courir chez les marchands ?…
Vous ne voudriez pas de cet éventail, ma chère cousine, si vous deviez en donner la valeur, répliqua le pauvre homme offensé, car c’est un chef-d’oeuvre de Watteau qui l’a peint des deux côtés ; mais soyez tranquille, ma cousine, je n’ai pas payé la centième partie du prix d’art. »

Répondez aux questions suivantes sur une feuille de classeur après y avoir spécifié le titre, l'auteur et la date ::

1 Dans quel milieu social se déroule la scène ? Relevez les indices qui justifient votre réponse.
2 Comment les personnages s’adressent-ils les uns aux autres dans cet extrait ?
3 Comment comprenez-vous l’expression « sciait en deux le président, la présidente et Cécile » ?
4 Relevez les éléments qui permettent de cerner le personnage du Cousin Pons dans ce passage ?
5 De quelle manière les paroles sont-elles rapportées dans cet extrait ? Quel est l’effet produit ?

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J'ai fait des phrases correctes OUI / NON
Il ne me manquait aucune information OUI / NON


Flaubert, Madame Bovary (1857)

Dans le chapitre 10 de Madame Bovary, le narrateur raconte l’enterrement de l’héroïne.

Les femmes suivaient, couvertes de mantes noires à capuchon rabattu ; elles portaient à la main un gros cierge qui brûlait, et Charles se sentait défaillir à cette continuelle répétition de prières et de flambeaux, sous ces odeurs affadissantes de cire et de soutane. Une brise fraîche soufflait, les seigles et les colzas verdoyaient, des gouttelettes de rosée tremblaient au bord du chemin, sur les haies d’épine. Toutes sortes de bruits joyeux emplissaient l’horizon : le claquement d’une charrette roulant au loin dans les ornières, le cri d’un coq qui se répétait ou la galopade d’un poulain que l’on voyait s’enfuir sous les pommiers. Le ciel pur était tacheté de nuages roses ; des fumignons bleuâtres se rabattaient sur les chaumières couvertes d’iris ; Charles, en passant, reconnaissait les
cours. Il se souvenait de matins comme celui-ci, où, après avoir visité quelque malade, il en sortait, et retournait vers elle.
Le drap noir, semé de larmes blanches, se levait de temps à autre en découvrant la bière. Les porteurs fatigués se ralentissaient, et elle avançait par saccades continues, comme une chaloupe qui tangue à chaque flot.
On arriva.
Les hommes continuèrent jusqu’en bas, à une place dans le gazon où la fosse était creusée.
On se rangea tout autour ; et tandis que le prêtre parlait, la terre rouge, rejetée sur les bords, coulait par coins, sans bruit, continuellement.
Puis, quand les quatre cordes furent disposées, on poussa la bière dessus.
Il la regarda descendre. Elle descendait toujours.

Répondez aux questions suivantes sur une feuille de classeur après y avoir spécifié le titre, l'auteur et la date : :

Cherchez le mot Decorum dans le dictionnaire.
1 Comment le decorum de la cérémonie est-il décrit par Flaubert ?
2 Que regarde le personnage de Charles Bovary ?

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J'ai fait des phrases correctes OUI / NON
Il ne me manquait aucune information OUI / NON


Flaubert, Un cœur simple, Trois Contes (1880)

Un cœur simple fait partie des Trois contes publiés par Flaubert à la fin de sa vie. Le récit est à l’image de son personnage, simple et avec peu d’artifice. Flaubert décrit le destin d’une figure sans importance, Félicité, la domestique restée au service de madame Aubain. L’extrait suivant décrit un des passages clés du récit : on vient d’offrir à madame Aubain un perroquet…


Il s’appelait Loulou. Son corps était vert, le bout de ses ailes rose, son front bleu et sa gorge dorée.
Mais il avait la fatigante manie de mordre son bâton, s’arrachait les plumes, éparpillait ses ordures, répandait l’eau de sa baignoire ; Mme Aubain, qu’il ennuyait, le donna pour toujours à Félicité.
Elle entreprit de l’instruire ; bientôt il répéta : « Charmant garçon ! Serviteur, monsieur ! Je vous salue, Marie ! » Il était placé auprès de la porte, et plusieurs s’étonnaient qu’il ne répondît pas au nom de Jacquot, puisque tous les perroquets s’appellent Jacquot. On le comparait à une dinde, à
une bûche : autant de coups de poignard pour Félicité ! Étrange obstination de Loulou, ne parlant plus du moment qu’on le regardait !
Néanmoins il recherchait la compagnie ; car le dimanche, pendant que ces demoiselles Rochefeuille, M. de Houppeville et de nouveaux habitués : Onfroy l’apothicaire, M. Varin et le capitaine Mathieu, faisaient leur partie de cartes, il cognait les vitres avec ses ailes, et se démenait si furieusement qu’il était impossible de s’entendre.
La figure de Bourais, sans doute, lui paraissait très drôle. Dès qu’il l’apercevait, il commençait à rire, à rire de toutes ses forces. Les éclats de sa voix bondissaient dans la cour, l’écho les répétait, les voisins se mettaient à leurs fenêtres, riaient aussi ; et, pour n’être pas vu du perroquet, M. Bourais se coulait le long du mur, en dissimulant son profil avec son chapeau, atteignait la rivière puis entrait par la porte du jardin ; et les regards qu’il envoyait à l’oiseau manquaient de tendresse. Loulou avait reçu du garçon boucher une chiquenaude, s’étant permis d’enfoncer la tête dans sa corbeille ; et depuis lors il tâchait toujours de le pincer à travers sa chemise. Fabu menaçait de lui tordre le col, bien qu’il ne fût pas cruel, malgré le tatouage de ses bras, et ses gros favoris. Au contraire ! Il avait plutôt du penchant pour le perroquet, jusqu’à vouloir, par humeur joviale, lui apprendre des jurons.

Félicité, que ces manières effrayaient, le plaça dans la cuisine. Sa chaînette fut retirée, et il circulait dans la maison. Quand il descendait l’escalier, il appuyait sur les marches la courbe de son bec, levait la patte droite, puis la gauche ; et elle avait peur qu’une telle gymnastique ne lui causât des étourdissements. Il devint malade, ne pouvait plus parler ni manger. C’était sous sa langue une épaisseur, comme en ont les poules quelquefois. Elle le guérit, en arrachant cette pellicule avec ses ongles. M. Paul un jour, eut l’imprudence de lui souffler aux narines la fumée d’un cigare ; une autre fois que Mme Lormeau l’agaçait du bout de son ombrelle, il en happa la virole ; enfin, il se perdit.
Elle l’avait posé sur l’herbe pour le rafraîchir, s’absenta une minute ; et, quand elle revint, plus de perroquet ! D’abord, elle le chercha dans les buissons, au bord de l’eau et sur les toits, sans écouter sa maîtresse qui lui criait :
Prenez donc garde ! Vous êtes folle !
Ensuite, elle inspecta tous les jardins de Pont-l’Évêque ; et elle arrêtait les passants.
Vous n’auriez pas vu, quelquefois, par hasard, mon perroquet ?
À ceux qui ne connaissaient pas le perroquet, elle en faisait la description.
Tout à coup, elle crut distinguer derrière les moulins, au bas de la côte, une chose verte qui voltigeait. Mais au haut de la côte, rien ! Un porte-balle lui affirma qu’il l’avait rencontré tout à l’heure à Saint-Melaine, dans la boutique de la mère Simon. Elle y courut. On ne savait pas ce qu’elle voulait dire. Enfin elle rentra épuisée, les savates en lambeaux, la mort dans l’âme ; et, assise au milieu du banc, près de Madame, elle racontait toutes ses démarches, quand un poids léger lui tomba sur l’épaule, Loulou ! Que diable avait-il fait ? Peut-être qu’il s’était promené aux environs ?
Elle eut du mal à s’en remettre, ou plutôt ne s’en remit jamais.


Répondez aux questions suivantes sur une feuille de classeur après y avoir spécifié le titre, l'auteur et la date ::

1 Que pensez-vous du nom du perroquet ? Commentez le choix de
Flaubert.
2 Relevez les éléments qui permettent de cerner le caractère de Félicité.
3 Pourquoi peut-on parler ici de passage satirique ? (Cherchez le mot dans le dictionnaire)

Répondez aux questions suivantes sur une feuille de classeur après avoir inscrit « questions sur le corpus » :


On appelle corpus l’ensemble des textes étudiés.

Comparez les textes

1 En quelques lignes, écrivez une synthèse sur le rôle que tient le décor dans les quatre extraits.
2 En comparant les quatre textes, vous commenterez l’importance des anecdotes.
3 De quelle manière les auteurs parviennent-ils à nous donner l’illusion que les personnages sont réels ?
4 Pour vous aider à répondre à cette question, vous remplirez le tableau (à refaire sur la feuille de classeur) :


Mateo Falcone
Le cousin Pons
Charles Bovary
Loulou
Félicité
Portrait physique





Portrait Moral





Langage







SYNTHESE : Sur votre cours, donnez les caractéristiques d'un texte réaliste.

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