Séance
3 : Etude d'un poème : « À New York » Léopold Sédar Senghor
Etude
d'un poème de la négritude -
Découvrir le
regard du poète sur une ville moderne – champs lexicaux –
personnifications et métaphores – registre fantastique - lexique
A
NEW YORK
I
(pour
un orchestre de jazz : solo de trompette)
- New York ! D'abord j'ai été confondu par ta beauté, ces grandes filles d'or aux jambes longues.
- Si timide d'abord devant tes yeux de métal bleu, ton sourire de givre
- Si timide. Et l'angoisse au fond des rues à gratte-ciel
- Levant des yeux de chouette parmi l'éclipse du soleil.
- Sulfureuse ta lumière et les fûts livides, dont les têtes foudroient le ciel
- Les gratte-ciel qui défient les cyclones sur leurs muscles d'acier et leur peau patinée de pierres.
- Mais quinze jours sur les trottoirs chauves de Manhattan
- - C'est au bout de la troisième semaine que vous saisit la fièvre en un bond de jaguar
- Quinze jours sans un puits ni pâturage, tous les oiseaux de l'air
- Tombant soudain et morts sous les hautes cendres des terrasses.
- Pas un rire d'enfant en fleur, sa main dans ma main fraîche
- Pas un sein maternel, des jambes de nylon. Des jambes et des seins sans sueur ni odeur.
- Pas un mot tendre en l'absence de lèvres, rien que des coeurs artificiels payés en monnaie forte
- Et pas un livre où lire la sagesse. La palette du peintre fleurit des Cristaux de corail.
- Nuits d'insomnie ô nuits de Manhattan si agitées de feux follets, tandis que les klaxons hurlent des heures vides
- Et que les eaux obscures charrient des amours hygiéniques, tels des fleuves en crue des cadavres d'enfants.
II
- Voici le temps des signes et des comptes
- New York ! or voici le temps de la manne et de l'hysope.
- Il n'est que d'écouter les trombones de Dieu, ton coeur battre au rythme du sang ton sang.
- J'ai vu dans Harlem bourdonnant de bruits de couleurs solennelles et d'odeurs flamboyantes
- - C'est l'heure du thé chez le livreur-en-produits-pharmaceutiques
- J'ai vu se préparer la fête de la nuit à la fuite du jour. Je proclame la Nuit plus véridique que le jour.
- C'est l'heure pure où dans les rues, Dieu fait germer la vie d'avant mémoire
- Tous les éléments amphibies rayonnants comme des soleils.
- Harlem Harlem ! voici ce que j'ai vu Harlem Harlem !
- Une brise verte de blés sourdre des pavés labourés par les Pieds nus de danseurs Dans
- Croupes ondes de soie et seins de fers de lance, ballets de nénuphars et de masques fabuleux
- Aux pieds des chevaux de police, les mangues de l'amour rouler des maisons basses.
- Et j'ai vu le long des trottoirs, des ruisseaux de rhum blanc des ruisseaux de lait noir dans le brouillard bleu des cigares.
- J'ai vu le ciel neiger au soir des fleurs de coton et des ailes de séraphins et des panaches de sorciers.
- Écoute New York ! ô écoute ta voix mâle de cuivre ta voix vibrante de hautbois, l'angoisse bouchée de tes larmes tomber en gros caillots de sang
- Écoute au loin battre ton coeur nocturne, rythme et sang du tam-tam, tam-tam sang et tam-tam.
SENGHOR,
Ethiopiques, 1956
Questions
:
Partie
I - Vers 1 à 6 :
a)
Vers 1 : À qui le poète s’adresse-t-il ?
b)
Vers 2 : Comment appelle-t-on cette figure de style ?
c)
Surlignez dans la première tous les termes qui montrent New york
comme une ville glaciale et sans âme.
d)
Relevez tous les termes du champ lexical de la Nature :
e)
En quoi le poète présente-t-il New York comme une ville fantastique
? (retour sur la notion de "genre fantastique", 4eme)
Partie
II :
a)
Cherchez dans un dictionnaire les définitions des mots suivants :
la
manne :
l'hysope
:
Trombones
:
Flamboyantes
:
Véridique
:
Germer
:
Amphibies
:
Sourdre
:
Croupes
:
Ondes
:
Nénuphars
:
Mangues
:
Séraphins
:
Panaches
:
Hautbois
:
b)
A présent que vous en avez défini les termes, la partie II du poème
vous paraît-elle claire ? Pourquoi ?
C
) Dessinez la ville à partir des images suscitées par la partie II
du poème de Senghor.
COURS
:
Leçon
n° 1: Le regard du poète sur la ville moderne.
La ville devient
un thème poétique dès la deuxième moitié du XIXe siècle,
notamment dans les poèmes de Baudelaire, Rimbaud ou Verhaeren. Au
début du XXe siècle, l’architecture nouvelle de verre, de béton
et de métal lui donne un nouveau visage. Des poètes comme Cendrars
et Apollinaire en font l’éloge.
Cependant
chez d’autres artistes, l’admiration et l’enthousiasme
cèdent la place à un regard critique porté sur les villes
modernes, où règnent les constructions et les relations
artificielles. Certains, comme Sédar Senghor, déplorent
l’absence de nature et d’humanité. La figure de la
personnification est souvent employée par les poètes pour
décrire la ville.
Leçon
n° 2: La négritude
Léopold
Sédar Senghor est l’un des fondateurs de la négritude,
courant littéraire qui affirme l’originalité de la culture
noire, et invite les écrivains noirs à revendiquer leurs
racines. La négritude prend naissance dans un contexte
d’anticolonialisme et s’exprime par les références à la nature
et aux civilisations africaines.
C
Synthèse:
Mini-évaluation /5
À
partir des éléments observés sur le tableau "Marcel
Gromaire (1892-1971), Brooklyn
Bridge, 1950"
rédigez un petit poème d’une quinzaine de vers libres dans lequel
tu décriras la ville de New York et rapportez les sentiments qu’elle
vous inspire. Vous ferez une personnification et emploierez le champ
lexical de la Nature.
Barème:
Rédaction
d'un poème d’une quinzaine de vers libres. / 1
Rapport
des sentiments inspirés par la ville. / 1
Personnifications
pour décrire New York. / 1
Présence
de métaphores /1
Appel
au lexique de la nature. /1
Orthographe,
accords sujet/verbe, la ponctuation : - 0.5 points /faute.
BROOKLYN
BRIDGE, 1950
Marcel
Gromaire (1892-1971),
Brooklyn Bridge,
1950
©
Musée d’Art Moderne / Roger-Viollet / ADAGP.
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