Séance
6 : Une nouvelle fantastique : la morte amoureuse
Travail
de groupe : l'hésitation fantastique
Incipit :
Vous
me demandez, frère, si j'ai aimé ; oui. C'est une histoire
singulière et terrible, et, quoique j'aie soixante six ans, j'ose à
peine remuer la cendre de ce souvenir. Je ne veux rien vous refuser,
mais je ne ferais pas à une âme moins éprouvée un pareil récit.
Ce sont des événements si étranges, que je ne puis croire qu'ils
me soient arrivés. J'ai été pendant plus de trois ans le jouet
d'une illusion singulière et
diabolique.
Moi, pauvre prêtre de campagne, j'ai mené en rêve toutes les nuits
(Dieu veuille que ce soit un rêve !) une vie de damné, une vie de
mondain et de Sardanapale.
Milieu
de la nouvelle :
Clarimonde
entra en robe de nuit, et, s'étant
débarrassée de ses voiles, s'allongea dans le lit auprès de moi.
Quand elle se fut bien assurée que je dormais, elle découvrit mon
bras et tira un e épingle d'or de sa tête ; puis elle se mit
à murmurer à voix basse :
"
Une goutte, rien qu'une petite goutte rouge, un rubis au bout de mon
aiguille !... Puisque tu m'aimes encore, il ne faut pas que je
meure... Ah! pauvre amour ! Ton beau sang d'une couleur pourpre si
éclatante, je vais le boire. Dors, mon seul bien ; dors, mon dieu,
mon enfant ; je ne te ferai pas de mal, je ne prendrai de ta vie que
ce qu'il faudra pour ne pas laisser éteindre la mienne. Si je ne
t'aimais pas tant, je pourrais me résoudre à avoir d'autres amants
dont je tarirais les veines ; mais depuis que je te connais, j'ai
tout le monde en horreur... Ah ! le beau bras ! Comme il est rond !
Comme il est blanc ! Je n'oserai jamais piquer cette jolie veine
bleue."
Et,
tout en disant cela, elle pleurait, et je sentais pleuvoir ses larmes
sur mon bras qu'elle tenait entre ses mains. Enfin elle se décida,
me fit une petite piqûre avec son aiguille et se mit à pomper le
sang qui en coulait. Quoiqu'elle en eût bu à peine quelques
gouttes, la crainte de m'épuiser la prenant, elle m'entoura avec
soin le bras d'une petite bandelette après avoir frotté la plaie
d'un onguent qui la cicatrisa sur le champ.
La
Morte Amoureuse, Théophile
Gauthier, 1836.
Questions :
Le
prénom de la créature est construit sur un mot-valise.
Quel est-il ?
Comment sait-on qu'il s'agit
d'un vampire ?
Comment la femme vampire
prélève-t-elle le sang ? Que pouvez vous en déduire sur son
caractère ?
Regardez l'incipit :
comment le prêtre qualifie-t-il sa vie auprès de la créature ?
Remplissez le tableau :
Vision
qu'a le prêtre à propos de la créature
|
Véritable
attitude de la créature
|
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|
≪
Le
fantastique, c’est l’hésitation éprouvée par un être qui ne
connaît que les lois naturelles, face a un
événement en apparence surnaturel […]. Un phénomène surnaturel
a lieu : pour obéir a son esprit déterministe, le lecteur se voit
oblige de choisir entre deux solutions : ou bien ramener ce phénomène
a des causes connues, a l’ordre naturel, en qualifiant d’imaginaire
les faits insolites ; ou bien d’admettre l’existence du
surnaturel et donc apporter une modification a l’ensemble des
représentations qui forment son image du monde. Le fantastique dure
le temps de cette incertitude ; des que le lecteur opte pour l’une
ou l’autre solution, il glisse dans l’étrange ou le merveilleux.
≫
T.
Todorov, Introduction
à la littérature fantastique
Les
temps du passe
Conjuguez
les verbes de ce récit au passé, en choisissant comme temps de
référence
le passé simple.
Soudain,
alors que je……………………….. (se retourner), je
……………………….. (croire) discerner comme une trainee
blanche entre deux ifs sombres, dans la zone du cimetiere la plus
eloignee de la tombe. En meme temps, une masse sombre ………………………..
(bouger), ou le professeur ………………………..
(disparaitre), et ……………………….. (se precipiter) vers
la trainee blanche. Je ……………………….. (bouger), moi
aussi, mais je ……………………….. (devoir) contourner des
tombes et des steles funeraires. Je ………………………..
(trebucher) a plus d’une reprise. Le ciel ………………………..
(etre) menacant et, quelque part au-dehors, un coq insomniaque
……………………….. (chanter). A quelques metres a peine,
au-dela de la ligne de genevriers qui ………………………..
(border) le sentier conduisant a l’eglise, une silhouette blanche,
presque diaphane, ……………………….. (glisser) en
direction de la tombe. Celle-ci etant cachee par une rangee d’arbres,
je ne ……………………….. (pouvoir) distinguer ou
……………………….. (disparaitre) au juste la silhouette.
J’………………………..
(entendre) par contre, a l’endroit meme ou j’………………………..
(distinguer) l’etrange forme, un bruit de pas precipite et, en
arrivant, ……………………….. (trouver) le professeur qui
……………………….. (tenir) dans ses bras un tout jeune
enfant.
D’apres
B. Stoker, Dracula
Inventez
la fin de la nouvelle « La morte Amoureuse » :
Séance
6 (suite) : Une nouvelle fantastique : la morte amoureuse
L'hésitation
fantastique - Exploiter un texte - Définir un genre
L'HESITATION
FANTASTIQUE :
D'après
Todorov : ≪
Le fantastique, c’est l’hésitation éprouvée par un être qui
ne connaît que les lois naturelles, face a un événement en
apparence surnaturel […]. Un phénomène surnaturel a lieu : pour
obéir à son esprit déterministe, le lecteur se voit obligé de
choisir entre deux solutions : ou bien ramener ce phénomène a des
causes connues, a l’ordre naturel, en qualifiant d’imaginaire les
faits insolites ; ou bien d’admettre l’existence du surnaturel et
donc apporter une modification à l’ensemble des représentations
qui forment son image du monde. Le fantastique dure le temps de cette
incertitude ; dès que le lecteur opte pour l’une ou l’autre
solution, il glisse dans l’étrange ou le merveilleux. ≫
T.
Todorov, Introduction
à la littérature fantastique
Surlignez
les mots clés et réécrivez les :
Texte :
Extrait de La Morte Amoureuse, p. 19 :
J'étais entièrement
rétabli et j'avais repris mes fonctions habituelles. Le
souvenir
de Clarimonde et les paroles du vieil abbé étaient toujours
présents
à mon esprit ; cependant aucun événement extraordinaire n'était
venu
confirmer les prévisions funèbres de Sérapion, et je commençais à
croire
que ses craintes et mes terreurs étaient trop exagérées ; mais une
nuit
je
fis un rêve. J'avais à peine bu les premières gorgées du sommeil,
que
j'entendis
ouvrir les rideaux de mon lit et glisser les anneaux sur les
tringles
avec un bruit éclatant ; je me soulevai brusquement sur le coude, et
je
vis une ombre de femme qui se tenait debout devant moi. Je reconnus
sur-le-champ
Clarimonde. Elle portait à la main une petite lampe de la
forme
de celles qu'on met dans les tombeaux, dont la lueur donnait à ses
doigts
effilés une transparence rose qui se prolongeait par une dégradation
insensible
jusque dans la blancheur opaque et laiteuse de son bras nu. Elle
avait
pour tout vêtement le suaire de lin qui la recouvrait sur son lit de
parade,
dont elle retenait les plis sur sa poitrine, comme honteuse d'être
si
peu
vêtue, mais sa petite main n'y suffisait pas, elle était si
blanche, que la
couleur
de la draperie se confondait avec celle des chairs sous le pâle
rayon
de
la lampe. Enveloppée de ce fin tissu qui trahissait tous les
contours de
son
corps, elle ressemblait à une statue de marbre de baigneuse antique
plutôt
qu'à une femme douée de vie. Morte ou vivante, statue ou femme,
ombre
ou corps, sa beauté était toujours la même ; seulement l'éclat
vert de
ses
prunelles était un peu amorti, et sa bouche, si vermeille autrefois,
n'était
plus teintée que d'un rose faible et tendre presque semblable à
celui
de
ses joues. Les petites fleurs bleues que j'avais remarquées dans ses
cheveux
étaient tout à fait sèches et avaient presque perdu toutes leurs
feuilles
; ce qui ne l'empêchait pas d'être charmante, si charmante que,
malgré
la singularité de l'aventure et la façon inexplicable dont elle
était
entrée
dans la chambre, je n'eus pas un instant de frayeur.
Questions :
1
- Quel indice nous montre qu'il est possible que tout ceci ne ce soit
jamais vraiment passé ?
2
- Relevez deux indices qui indiquent que Clarimonde est morte /
d’autres
qui
contredisent cet état :
3
- Quelles sont les deux explications possibles aux événements ?
4
- Peut-on trancher en faveur d’une des deux explications ?
5
- Remplissez le tableau :
ELEMENTS EN FAVEUR DE
L'EXPLICATION RATIONNELLE
(l’Événement n'a pas
vraiment eu lieu)
|
ELEMENTS EN FAVEUR DE
L'EXPLICATION IRRATIONNELLE
(l’Événement a vraiment eu
lieu)
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